Retour
Je retourne au pays avec Jean mon mari en Septembre mil neuf cent cinquante trois….il y a dix ans j’en repartais l’âme chavirée . Philibert mon grand-père a rejoint –« les prairies célestes ». Grand’mère Angèle nous accueille à bras ouvert en compagnie de Francoeur le chien .
Le lendemain de notre arrivée , dans la matinée j’entraîne Jean en balade .
Dans le sac que nous emportons grand’mère glisse le faucillon de grand père…elle ne dit rien… c’est sa façon de me faire comprendre qu’elle sait le but de notre promenade…pourtant , je ne lui ai rien dit…complicité de femmes ! Chemin faisant je raconte a Jean l’ histoire du Moulin de l’Embellie ainsi que ma rencontre avec ses habitants , et l’ immense chagrin qui m’a submergé.
Les quatre Chênes montent toujours la garde à l’orée des chemins , ils sont encore plus imposant que dans mon souvenir.
Le sentier menant à l’Embellie disparaît sous les herbes folles les haies prennent toute la place. Les orties sont presque géantes et nous piquent cruellement . Avec le faucillon Jean trace un passage , nous avançons difficilement ; au fur et à mesure de notre progression les bruits de la nature s’estompent .-
« J’ai l’impression , de passer le seuil d’ un autre monde depuis que j’ai commencé à faire le passage » me dit il , je suis de son avis , retrouvant la vibration étrange qui m’avait saisie lors de ma venue avec Madeleine .
Les ronciers sont –« monstrueux »; pas un souffle d’air dans cette pénombre verte….Enfin par une trouée le ciel apparaît…quelques coups de faucille…nous fermons les yeux éblouit par la clarté ; les ouvrant…nous sommes au bord du ciel !
En contre bas du lieu où nous sommes , la clairière baigne dans la même brume ensoleillée ! La maison disparaît sous la clématite qui s’est appropriée la roue à eau entièrement , et chevauche la toiture . Un églantier planté prés du porche lui tient compagnie . La source ne chante plus..